De nombreuses maladies psychiatriques entraînent des difficultés cognitives c’est-à-dire des difficultés touchant la mémoire, les capacités d’attention, de concentration, ou encore d’organisation ou de planification face à des tâches complexes. Des études ont montré que ces troubles des facultés cognitives jouent un rôle dans l’expression des symptômes de la maladie. Cela signifie qu’ils peuvent avoir des conséquences sur la vie des personnes dont ils entravent la capacité à mener une existence autonome et intégrée dans la société. S’ils ne sont pas pris en charge, ils peuvent même avoir un impact négatif sur le pronostic d’évolution de la maladie. Dans le cas de la schizophrénie ou de la dépression par exemple, les troubles de l’attention et de la mémoire bien que ne faisant pas partie des symptômes majeurs de la maladie, peuvent pénaliser fortement la vie sociale et professionnelle des personnes et donc a contrario la récupération de ces capacités d’attention et de mémoire va favoriser la réinsertion sociale et professionnelle.
C’est en partant de ce constat et en s’inspirant de ce qui était déjà pratiqué par les neurologues que la prise en charge dite de remédiation cognitive est apparue en psychiatrie. Son objectif est de proposer aux personnes affectées par cette sorte de troubles une prise en charge qui leur permette de récupérer leurs capacités cognitives ou tout au moins d’apprendre à les compenser avec la finalité ultime de récupérer une qualité de vie satisfaisante.
Le neuropsychologue est le professionnel de santé qui va mettre en place la remédiation cognitive. C’est à la suite d’entretiens cliniques qui vont permettre de comprendre les besoins et difficultés au quotidien de la personne que ce spécialiste va pouvoir élaborer et proposer à son patient une évaluation neuropsychologique qui doit permettre de déterminer la nature et la sévérité exactes des troubles rencontrés. En fonction des résultats, des propositions de remédiations cognitives vont être faites et discutées avec la personne. La remédiation cognitive sera également intégrée dans le cadre d’une intervention pluridisciplinaire. Sur une période de plusieurs semaines et à un rythme de plusieurs séances hebdomadaires, on va alors proposer toute une série d’exercices ou tâches cognitives. Ces tâches évolueront en fonction des progrès constatés et objectifs désirés et deviendront de plus en plus difficiles et complexes. La personne concernée par cette remédiation va apprendre à utiliser des stratégies qui doivent permettre aux personnes en situation de handicap cognitif de recouvrer leurs capacités cognitives, ou tout au moins d’arriver à les compenser dans la vie courante.
La question du transfert des compétences à la vie réelle de la personne est fondamentale pour une prise en charge de remédiation cognitive réussie. Il s’agit de remédier à des situations de handicap liées à la maladie en développant de nouvelles voies et solutions cognitives pour cela. L’enjeu est moins la normalisation de l’évaluation neuropsychologique (comme être de nouveau en mesure d’avoir un bon niveau de concentration ou de mieux retenir les informations) que la diminution des situations de handicap. C’est cela qui va aussi améliorer la qualité de vie.
Enfin, face à des objectifs aussi vastes, le neuropsychologue ne travaille pas seul. La prise en charge neuropsychologique à visée de remédiation cognitive s’insère dans la prise en charge globale de la personne et son efficacité dépend également des autres suivis sur le plan psychiatrique, psychologique, de réhabilitation des habiletés sociales, etc. C’est la complémentarité de ces différentes approches qui permet l’appréhension de la personne dans sa globalité et donc de mieux adapter le suivi à ses difficultés quotidiennes.
Florent Bernardin, neuropsychologue au Centre Psychothérapique de Nancy