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Condition Féminine

La violence conjugale

Verbale, psychologique, physique, sexuelle ou économique, la violence de couple revêt des formes multiples qui souvent s’entremêlent. Jadis banalisées, aujourd’hui punies par la loi, les violences conjugales tendent à être de plus en plus dénoncées.

D’après les chiffres du ministère de l’intérieur, en France au cours de l’année 2010, 146 femmes sont décédées en une année victimes de leur compagnon ou ex-compagnon. En moyen une femme décède tous les 2,5 jours et un homme tous les 13 jours.

La violence conjugale n’est pas un conflit de couple dont l’issue est incertaine, mais un processus de domination sexiste. Elle s’exerce dans le cadre familial. Les enfants témoins en sont également victimes, mais ils peuvent également subir des maltraitances parfois mortelles [LHT].

Personne n’est à l’abri de ce type de violences. Elle sévit dans toutes les catégories sociales, économiques et culturelles, en milieu urbain ou rural et quel que soit le contexte éducatif ou religieux.

Dans leur très grande majorité, les victimes sont des femmes en raison des stéréotypes culturels sexistes.

Les hommes victimes sont moins nombreux et subissent essentiellement des violences psychologiques.

En dépit des campagnes de sensibilisation, les victimes de violences conjugales sont encore stigmatisées par la société qui se fait l’alliée objective des agresseurs : « Elles aiment ça ? On les voit toujours bras dessus bras dessous ? Elle refuse toute aide ? »

CLINIQUE DE LA VIOLENCE CONJUGALE

La violence conjugale se manifeste très souvent par cycles d’escalade de tension : agressions psychologiques, verbales puis physiques : La femme tente désespérément de contrôler de la situation en la minimisant, en la niant, voire en s’attribuant la cause de la violence de son partenaire qui ne manque pas de lui reprocher son attitude soi-disant insupportable pour se justifier.

Les violences, de plus en plus sévères s’inscrivent dans une escalade qui commence par exemple par une série de paroles de disqualification, des attaques verbales ou non verbales qui se transforment en harcèlement moral [LHT], lequel embrouille la victime, la met sous emprise psychologique, diminue sa résistance et l’empêche d’agir.

Le passage à l’acte violent, est un des moyens de terroriser la victime pour asseoir une totale domination sur l’autre, devenu un simple objet.
Après chaque crise, s’installe une période de rémission. Le conjoint a tendance à regretter ce qu’il a fait et à vouloir se faire pardonner tout en faisant porter la responsabilité de ses actes sur son partenaire qui se prend à espérer : c’est la fameuse période de « lune de miel » jusqu’à la prochaine escalade de violences.

Au fur et à mesure qu’augmentent la fréquence et la sévérité de la violence, notamment psychologique, les femmes perdent confiance en elles. Elles sont déstabilisées, angoissée, isolées confuses et deviennent de moins en moins capables de prendre une décision. En même temps, il se crée un phénomène de soumission au partenaire qui s’explique par des mécanismes neurobiologiques et psychologiques mettant en jeu l’évitement de la souffrance et la recherche d’un apaisement.

La mise sous emprise se fait au niveau cognitif par des distorsions du langage et de la communication qui placent les femmes dans la confusion et les empêchent de comprendre qu’elles subissent une atteinte à leur intégrité. L’emprise peut aussi amener chez ces femmes des états de conscience modifiée, une sorte d’état hypnotique imposé ou dissociation [LHT].
Les troubles psychologiques sont importants.

Les états dépressifs, très fréquents comportent un risque de passage à l’acte suicidaire.

Plus qu’un Etat de stress post-traumatique [LHT], les victime présentent plus souvent des troubles de la personnalité dite « Traumatique complexe » LHT] qui se manifestent par :

  • La confusion.
  • La peur.
  • Des sentiments de honte, de culpabilité, d’impuissance.
  • Un effondrement de l’estime de soi et des troubles affectant gravement leur identité personnelle, sexuelle, familiale et sociale.
  • De troubles anxieux divers.
  • De conduites additives (alcoolisation).
  • De troubles psychosomatiques divers.

Les causes d’un certain nombre de situations de violences familiales s’inscrivent dans la répétition littérale de comportements appris dans l’enfance, lesquels sont confortés par les stéréotypes sexistes.

CONDUITE À TENIR FACE A UNE VICTIME DE VIOLENCE CONJUGALE

L’analyse « purement » psychologique de la violence conjugale, entretient le déni et compromet l’indispensable critique des stéréotypes sexistes [LHT].

La reconnaissance de la souffrance et de la réalité des sévices est le premier pas vers une possible « reconstruction » et d’une reprise en main de la vie d’une victime sous emprise Il est essentiel de tenir compte de tous les aspects de la violence, et pas simplement de la violence physique. Il n’y a jamais de violences physiques sans violence psychologique. Le professionnel mais aussi le proche ou le témoin doit contrôler les sentiments et les contre attitudes violentes que génèrent ces victimes. Ces contre attitudes de rejet s’allient objectivement avec les agresseurs et pérennisent le système qui justifie la violence. Fatigue, dépression, provocation, déni des troubles psychologiques servent trop souvent à justifier l’agression ou constituent des excuses communément admises, favorables à l’agresseur.

Les réponses médico-socio-judiciaires inadaptées : main courante, classement sans suite, médiation pénale ou familiale, thérapie familiale, etc. font également le jeu du système agresseur.

1/ Orienter les femmes victimes de violences vers les associations de défense et de soutien des femmes [LHT]. Relais efficaces pour les accompagner, car une intervention ponctuelle ne porte pratiquement jamais ses fruits. Assurer la sécurité d’une femme victime de violence conjugale est une priorité.

2/ Informations sur ses droits [LHT]. Ordonnance de protection des victimes [LHT].

3/ Rôle fondamental de l’avocat spécialisé qui travaille avec l’association.

4/ Suivi Psychologique et médical [LHT]. Rédiger un certificat médical [LHT].

SOINS

Le parcours pour sortir du cycle de la violence est long, il est semé de va-et-vient. Il faut prendre garde à ne pas se comporter comme un agresseur car les femmes victimes de violence génèrent souvent des sentiments complexes (d’incompréhension irritée) par le mécanisme d’identification projective.

Il est fondamentale d’aider le patient à se « re-narcissiser », c’est à dire à retrouver une estime de soi, à reprendre confiance dans ses compétences cognitives et professionnelles, dans ses capacités d’analyses, à se recréer un univers sécurisé et à faire des projets, à restaurer des liens affectifs et sociaux, à développer des activités personnelles (créatives, sportives, associatives).

Le traitement s’apparente au traitement des troubles traumatiques complexes [LHT].

Dans les groupes de paroles organisés par les associations sont une aide précieuse : les femmes apprennent à se faire confiance entre elles mais aussi dans une aide extérieure possible, à critiquer le système de domination sexiste et à trouver des solutions avec l’aide des animatrices.

Penser aux enfants témoins, victimes indirectes, qui vivent parfois des situations de danger qui pourraient nécessiter un signalement aux autorités administratives ou judiciaires [LHT].

QUELQUES REFERENCES

  • Francequin, G. Tu me fais peur quand tu cries ! Sortir des violences conjugales. Erès, 2010
  • Lopez G, Portelli S et Clément S. Les droits des victimes : Droit, audition, expertise, clinique. Dalloz, 2007
  • Lopez, G., Comment ne plus être victime. L’Esprit du Temps, 2007
  • Millet E. Pour en finir avec les violences conjugales. Marabout, 2005
  • Sadlier K et col. L’enfant face à la violence dans le couple. Dunod, 2010

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